Carlsendro Chéry.

Le ministère ?
« Un fruit qui va mûrir avec le temps »


Dimanche 18 octobre, cinq jeunes haïtiens ont été ordonnés
prêtres, à Guiclan. Parmi eux, Carlsendro Chéry, 28 ans.
En devenant Prêtre de Saint-Jacques,
il a choisi de donner sa vie pour la mission.

Né à Léogâne, ville de la province ecclésiastique du sud, à Haïti, Carlsendro est l’aîné de trois enfants. Il a grandi dans une famille catholique. « Chez nous, on ne précise pas si on est pratiquant ou non. C’est une évidence à partir du moment où on dit avoir la foi. » Carlsendro reçoit une éducation chrétienne et va à l’école catholique de la maternelle au primaire. « Dans ma famille, nous vivions un temps de prière tous les jours. J’ai vraiment été enraciné dans la foi. »

Adolescent, Carlsendro fait partie d’une chorale et rejoint un groupe Kiro (l’équivalent des scouts). Engagé dans sa paroisse, servant de messe… Le jeune homme est très impliqué dans la vie de sa communauté chrétienne. « Je visitais les malades également. Avec ma chorale, une fois par mois, nous nous mettions au service des plus âgés. On avait du temps libre en dehors de l’école. » Pour autant, Carlsendro va au lycée public. « Grâce aux activités de l’Église, j’ai gardé le lien avec les prêtres de ma paroisse, les aumôniers, les religieux. J’ai eu la chance de grandir dans une communauté très vivante. »

Son appel, Carlsendro l’entend assez tôt. « Ma vocation ? J’avais huit ans. J’avais un copain dont le frère était séminariste. Lorsque j’en ai parlé à ma grand-mère, elle n’a pas bien accueilli la nouvelle. Elle avait peur que j’abandonne ma famille. Chez nous, quand on entre au couvent, on quitte la famille pour toujours. » Le jeune garçon met l’idée de côté un temps mais sa manière de vivre sa foi intensément et les gens autour de lui perçoivent sa vocation. « Lorsque j’avais 17 ans, une religieuse est venue me demander ce que je voulais faire après le bac. À ce moment-là, j’avais toujours en tête de devenir prêtre ou psychologue mais je n’ai pas osé le dire. » Deux semaines plus tard, la même personne lui repose la question et lui confie voir en lui le profil d’un futur prêtre. « Je lui ai partagé la réaction de ma grand-mère des années plus tôt. Après m’avoir rassuré et dit que ce n’était à ma famille de décider pour moi, elle m’a envoyé réfléchir. Sa communauté religieuse m’a invité à la cérémonie de vœux d’un ami jésuite. »

En 2010, Haïti connaît un grave tremblement de terre et Léogâne est l’épicentre. « Les églises ont été détruites et rapidement, des Prêtres de Saint-Jacques sont venus célébrer la messe en extérieur, là où c’était possible. J’ai fait la connaissance de l’un d’eux car je continuais à servir la messe, même sous la pluie. J’ai été frappé par sa foi, sa proximité avec les gens et sa disponibilité. » En 2012, alors que Carlsendro est en études d’informatique, il intervient chez des religieuses et il aperçoit ce même prêtre de Saint-Jacques avec un groupe de jeunes. « J’ai été surpris et j’ai demandé aux sœurs de me permettre de le rencontrer. Avec elles, je discernais depuis près de quatre ans ma vocation. » En mai, il rencontre le prêtre qui lui parle de saint-Jacques, de la mission et lui dit qu’il l’attendait depuis 2010. À l’automne 2012, Carlsendro est invité à cheminer avec les Prêtres de Saint-Jacques pour trois rencontres sur l’appel du Christ. Après un an de discernement, il demande à entrer en année de propédeutique. « J’ai vécu un beau chemin avec le Christ et avec mes cinq autres frères, entrés la même année. Nous avons appris à nous accepter avec nos différences, nos limites et nous nous sommes soutenus pour avancer. »

En 2014, Carlsendro entre au grand séminaire Notre-Dame, qui rassemble les jeunes des dix diocèses du pays. Après deux années où il a appris à être « un frère parmi d’autres frères, un ami parmi les autres », le jeune séminariste est envoyé en France pour continuer sa formation. Au séminaire Saint-Luc d’Aix-en-Provence, en paroisse dans le diocèse de Marseille, Carlsendro arrive « avec sa culture, les mains vides. Je me suis laissé guider sans a priori. Mon cœur était disponible. On m’a accueilli et j’ai accueilli chacun ». Dans sa paroisse de la Ciotat, il a pris des initiatives, montré l’image d’un « jeune diacre créatif et inventif ». Groupe des servants de messe, service évangélique des malades, équipe d’animation liturgique, mouvement chrétien des retraités… « Il faut faire vivre la fraternité, se soucier les uns des autres. Ensemble, on fait Église. »

Ordonné le 18 octobre au Centre Missionnaire Saint-Jacques, Carlsendro est retourné dans sa paroisse marseillaise où il était « attendu ». La tête pleine d’idées, le cœur prêt à la rencontre, Carlsendro voit son ministère comme un fruit qui va mûrir au fil des années.

 

Courtoisie de Madame Marine Jouannic
Église en Finistère