Le cycle des conférences 2018-2019 s’est ouvert ce dimanche 14 octobre avec une intervention très appréciée du Frère Jean-Michel GRIMAUD. Une bonne centaine de personnes s’était rassemblée pour écouter avec intérêt le Père Abbé du monastère bénédictin Saint Guénolé de Landévennec.
Très posé et avec un langage clair, le Frère Jean-Michel introduisait pédagogiquement l’assistance au cœur du thème qu’il a été appelé à traiter : « Place de la vie monastique dans la mission de l’Église ». En exorde, le conférencier relevait la question plurielle sous-jacente au thème : la vie monastique a-t-elle une place dans la mission de l’Église ? Si oui, laquelle ? Loin de se prendre au piège d’une démarche qui consisterait à répondre par oui ou par non à une telle interrogation, il s’est appliqué à reprendre brièvement l’histoire du monachisme. Ce faisant, il a centré la question sur la manière monastique de vivre la mission dans l’Église. La mission de l’Église.
Retraçant à grands traits l’histoire du monachisme, le frère Jean-Michel a montré combien l’histoire du monastère bénédictin de Saint Guénolé s’inscrit dans la ligne droite des Pères fondateurs. Saint Antoine et Saint Jérôme, Saint Martin et Saint Cassien, avec un parcours géographique qui fait passer d’Égypte, en passant par Marseille, à Cornouailles, en Armorique. L’histoire monastique s’inscrit dans le cadre de la migration des chrétiens. Au point de départ l’idéal monastique n’était nullement porté par le souci missionnaire d’aller annoncer le Christ, mais se retirer à l’écart dans la perspective d’une quête de Dieu, et d’une conversion à lui.
Avec Saint Colomban – en Irlande – la vie monastique est essentiellement comprise comme Peregrinatio Pro Deo. Toute la démarche du moine est pensée dans la perspective de la vie céleste, comme vie avec Dieu. Avec cette pèlerinage vers Dieu, au 7ème siècle, prend corps les notions de Predicatio (prédication) et de Missio (Mission). Le conférencier conclut alors que la mission dans la vie monastique est une retombée de la peregrinatio pro Deo. Ainsi, la figure du moine est d’abord celle d’un itinérant, et secondaire l’Évangélisation en direction d’autres personnes. Ce qui est en jeu, c’est sa propre conversion.
Ce n’est que suite à l’invasion des barbares que les moines seront orientés vers l’éducation, et surtout de celle de la classe aisée. Les monastères sont devenus le lieu de conservation du savoir antique, un lieu culturel et économique. Mais comme le rappelait le Pape Benoît XVI le 12 septembre 2008 au Collège des Bernardins, « Leur objectif [des moines] était de chercher Dieu, quaerere Deum ». Et c’est à leur corps défendant qu’ils ont été amenés à s’impliquer dans la conservation et à la propagation de la culture, avec l’apparition et le développement des Scriptorium et des bibliothèques. La vie des moines, avec la règle de Saint Benoît vise à maintenir l’équilibre entre travail manuel et intellectuel, surtout en des contextes socio-politiques qui n’épargnaient pas l’Église, trop mêlée à l’État. Ainsi, l’accent est vite mis sur la grandeur du travail humain à la lumière des Écritures, comme participation à l’œuvre de Dieu. Le moine qui travaille de ses mains dit la noblesse du travail, mais aussi respect et contemplation de Dieu comme Créateur. Travail manuel et intellectuel pratiqué par les moines porte à nue le projet chrétien d’une société sans classe.
A ce propos, le conférencier s’est reporté au discours du Pape Paul VI prononcé à Montecassino, en 1964, lieu où Saint Benoît a été proclamé Patron de l’Europe. A propos de Saint Benoît et des moines bénédictins, le pape disait alors : « C’est lui principalement et ses fils qui, avec la croix, le livre et la charrue, apporteront le progrès chrétien aux populations s’étendant de la Méditerranée à la Scandinavie, de l’Irlande aux plaines de Pologne (cf. A. A. S., 1947, p. 453) ». Le Père Abbé de Saint-Guénolé en conclut : « l’engagement missionnaire des moines vient en conséquence d’une vie faite de recherche de Dieu, qui les pousse à faire naître une culture humaniste. Il en vient à souligner une autre chose d’importance : la mission n’est pas seulement annoncer (en parole), mais faire grandir en humanité. Pour corroborer son dire, il cite d’ailleurs Bergson : « Les saints n’ont pas besoin de parler. Leur vie est un appel ! ». Fidèles à leur appel, ils ont facilité des conversions. Loin de créer des déserts autour des monastères, ils ont donné le témoignage d’hommes et de femmes engagés dans la vie avec leurs semblables, par l’accueil, l’écoute et le partage.
Avec Rerum ecclesiae de Pie XI, la vie monastique a été promue dans les jeunes Églises. Ainsi en vient-on à la présence de 450 monastères dans les pays émergeants.
Avec Ad Gentes (n° 11 et 12), l’Église demande que la vie contemplative soit instaurée partout dans les jeunes Églises.
L’expérience de Sainte Thérèse de Lisieux renforce cette conception de l’Église quant à la vocation chrétienne : O Jésus, mon Amour… ma vocation, enfin je l’ai trouvée, ma vocation, c’est l’amour …
L’évangélisation se fait par attraction. Dire Dieu, c’est orienter les regards vers Lui.
Ne rien préférer à Dieu
La vie monastique est une affaire de préférence donnée à Dieu. Rien n’est plus important que la rencontre avec le Seigneur, que la disponibilité à servir, à se laisser déranger. Elle unifie la vie. C’est pour cette raison, un moine renonce à être spécialiste de quoi que ce soit. S’il arrive aux moines de s’occuper d’éducation ou autres, ce n’est pas que des conséquences de l’accueil et du service des pauvres auxquels ils ne peuvent manquer.
Le moine est celui qui apprend à s’arrêter. Détaché, les moines n’ont pas de maison propre. Ils se savent hôtes de la maison de Dieu (Monastère).
Le moine cherche à ne pas déplaire à quiconque vient à lui. En celui qui vient à lui, le moine se doit de reconnaître et de servir le Christ.
L’engagement à la vie monastique se fonde aussi sur la volonté d’avancer ensemble. Il s’agit d’une fraternité fondée sur l’amour du Christ.
Le moine est celui qui s’exerce à développer le sens de la mesure en toute chose.
Les outils de travail sont ainsi considérés de la même manière que des vases sacrés.
Une dernière caractéristique ; c’est la stabilité dans un lieu. D’abord, dans une communauté. Il s’agit de tenir ensemble dans la durée, dans un lieu, une église, une localité. Ce n’est pas que physique mais humaine et ecclésiale. Nous sommes appelés à vivre ensemble sur une même planète…
A suivre !
Rien que pour aujourd’hui
Être ton épouse, ô Jésus, être carmélite, être par mon union avec toi la mère des âmes, cela devrait me suffire… il n’en est pas ainsi… Sans doute, ces trois privilèges sont bien ma vocation, Carmélite, Épouse et Mère, cependant je sens en moi d’autres vocations, je me sens la vocation de guerrier, de prêtre, d’apôtre, de docteur, de martyr; enfin, je sens le besoin, le désir d’accomplir pour toi Jésus, toutes les œuvres les plus héroïques… Je sens en mon âme le courage d’un Croisé, d’un Zouave Pontifical, je voudrais mourir sur un champ de bataille pour la défense de l’Église…
Je sens en moi la vocation de prêtre; avec quel amour, ô Jésus, je te porterais dans mes mains lorsque, à ma voix, tu descendrais du Ciel… Avec quel amour je te donnerais aux âmes … Mais hélas ! tout en désirant d’être Prêtre, j’admire et j’envie l’humilité de St François d’Assise et je me sens la vocation de l’imiter en refusant la sublime dignité du Sacerdoce.
O Jésus ! mon amour, ma vie… comment allier ces contrastes ?
Comment réaliser les désirs de ma pauvre petite âme ?…
Ah ! malgré ma petitesse, je voudrais éclairer les âmes comme les Prophètes, les Docteurs, j’ai la vocation d’être Apôtre… je voudrais parcourir la terre, prêcher ton nom et planter sur le sol infidèle ta Croix glorieuse, mais, ô mon Bien-Aimé, une seule mission ne me suffirait pas, je voudrais en même temps annoncer l’Évangile dans les cinq parties du monde et jusque dans les îles les plus reculées… Je voudrais être missionnaire non seulement pendant quelques années, mais je voudrais l’avoir été depuis la création du monde et l’être jusqu’à la consommation des siècles… Mais je voudrais par-dessus tout, ô mon Bien-Aimé Sauveur, je voudrais verser mon sang pour toi jusqu’à la dernière goutte…Le Martyre, voilà le rêve de ma jeunesse, ce rêve il a grandi avec moi sous les cloîtres du Carmel… Mais là encore, je sens que mon rêve est une folie, car je ne saurais me borner à désirer un genre de martyre… Pour me satisfaire, il me les faudrait tous… Comme toi, mon Époux Adoré, je voudrais être flagellée et crucifiée… je voudrais mourir dépouillée comme St Barthélémy… Comme St Jean, je voudrais être plongé dans l’huile bouillante, je voudrais subir tous les supplices infligés aux martyrs… Avec Ste Agnès et Ste Cécile, je voudrais présenter mon cou au glaive et comme Jeanne d’Arc, ma sœur chérie, je voudrais sur le bûcher murmurer ton nom, o Jésus… En songeant aux tourments qui seront le partage des chrétiens au temps de l’Antéchrist, je sens mon cœur tressaillir et je voudrais que ces tourments me soient réservés… Jésus, Jésus, si je voulais écrire tous mes désirs, il me faudrait emprunter ton livre de vie, là sont rapportées les actions de tous les Saints et ces actions, je voudrais les avoir accomplies pour toi…
O mon Jésus ! à toutes mes folies que vas-tu répondre ?… Y a-t-il une âme plus petite, plus impuissante que la mienne !… Cependant à cause même de ma faiblesse, tu t’es plu, Seigneur, à combler mes petits désirs enfantins, et tu veux aujourd’hui, combler d’autres désirs plus grands que l’univers…
A l’oraison mes désirs me faisant souffrir un véritable martyre, j’ouvris les épîtres de St Paul afin de chercher quelque réponse. Les chap. XII et XIII de la première épître aux Corinthiens me tombèrent sous les yeux… J’y lus, dans le premier, que tous ne peuvent être apôtre, prophètes, docteurs, etc… que l’Église est composée de différents membres et que l’œil ne saurait être en même temps la main… La réponse était claire mais ne comblait pas mes désirs, elle ne me donnait pas la paix… Comme Madeleine se baissant toujours auprès du tombeau vide finit par trouver ce qu’elle cherchait, ainsi, m’abaissant jusque dans les profondeurs de mon néant je m’élevai si haut que je pus atteindre mon but… Sans me décourager je continuai ma lecture et cette phrase me soulagea : «Recherchez avec ardeur les dons les plus parfaits, mais je vais encore vous montrer une voie plus excellente.» Et l’Apôtre explique comment tous les dons les plus parfaits ne sont rien sans l’amour… Que la Charité est la voie excellente qui conduit sûrement à Dieu.Enfin j’avais trouvé le repos… Considérant le corps mystique de l’Église, je ne m’étais reconnue dans aucun des membres décrits par St Paul, ou plutôt je voulais me reconnaître en tous… La Charité me donna la clef de ma vocation. Je compris que si l’Église avait un corps, composé de différents membres, le plus nécessaire, le plus noble de tous ne lui manquait pas, je compris que l’Église avait un Cœur, et que ce Cœur était brûlant d’amour. Je compris que l’Amour seul faisait agir les membres de l’Église, que si l’Amour venait à s’éteindre, les Apôtres n’annonceraient plus l’Évangile, les Martyrs refuseraient de verser leur sang.. Je compris que l’amour renfermait toutes les vocations, que l’amour était tout, qu’il embrassait tous les temps et tous les lieux… en un mot, qu’il est éternel !…
Alors dans l’excès de ma joie délirante, je me suis écriée : O Jésus, mon Amour… ma vocation, enfin je l’ai trouvée, ma vocation, c’est l’amour …
Oui j’ai trouvé ma place dans l’Église et cette place, ô mon Dieu, c’est vous qui me l’avez donnée… dans le Cœur de l’Église, ma Mère, je serai l’Amour… ainsi je serai tout… ainsi mon rêve sera réalisé !!!…