Méditation de Carême 2
par le Père Paul Dossous, spsj
Troisième Dimanche de Carême 2022 – Année C
Textes bibliques : Ex 3, 1-8.13-15 ; 1Cor 10, 1-6.10-12 ; Lc 13, 1-9
Nous sommes déjà au 3ème dimanche de Carême, de l’année liturgique C. Nous continuons notre marche et notre montée vers Pâques. Tout au long de ce temps gratuit qui nous est offert au cœur de l’Église, notre Mère, nous essayons, dans la mesure du possible, de suivre fidèlement le Seigneur dans son Fiat au Père, jusqu’à la Nuit Pascale où nous pourrons acclamer, espérons-le, à plein poumon : l’Exultet.
Après avoir célébré les dimanches des « tentations » et « de la transfiguration » de Jésus, aujourd’hui la liturgie de la parole fait ressortir l’urgence de la conversion par la rénovation de notre vie baptismale. Une conversion qui se traduit dans la réponse de foi à la patience de Dieu. Le Carême est bien le temps de la patience de Dieu ; temps qu’il nous donne pour que nous puissions produire des fruits de justice et de fraternité. Se convertir implique se tourner vers Dieu et produire des fruits de l’amour, de la solidarité et de la paix.
Le message du Pape François pour le Carême nous éclaire bien : « En ce temps de conversion, trouvant appui dans la grâce de Dieu et dans la communion de l’Église, ne nous lassons pas de semer le bien. Le jeûne prépare le terrain, la prière l’irrigue, la charité le féconde. […] Pratiquant l’amour fraternel envers tous, nous sommes unis au Christ, qui a donné sa vie pour nous (cf. 2 Co 5, 14-15) et nous goûtons d’avance la joie du Royaume des Cieux, quand Dieu sera « tout en tous » (1 Co 15, 28).
Oui, sœurs et frères, sur le chemin de la conversion, illuminés par le « Buisson ardent », nous percevons toujours que quelque chose pourrait être mieux, dans ce que nous faisons et que nous sommes. Dans la première lecture, Moïse est invité à être le chef du peuple, le visage visible de l’action libératrice que le Seigneur réalisera en faveur d’Israël, son peuple opprimé. Dieu se révèle à Moïse, il lui dit qui Il est : « Je suis Qui je suis […]. Tu parleras ainsi aux fils d’Israël : Celui qui m’a envoyé vers vous, c’est JE-SUIS […]. Celui qui m’a envoyé vers vous, c’est Yahvé, c’est le Seigneur, le Dieu de vos pères, le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac, le Dieu de Jacob« . Une espèce de signe qui confirme que Moïse est invité et envoyé par Dieu en mission. « Celui qui m’a envoyé vers vous, c’est JE-SUIS » – Nom qui accentue la présence continue de Dieu dans la vie de son Peuple. Une présence vive, active et dynamique, dans le présent et dans le futur, comme libération et salut.
C’est dans cet esprit que Jésus nous lance un vibrant et express appel à la conversion. « Si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même. Oui, si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de la même manière ». Par cette invitation, cette interpellation, Jésus a donc demandé de ne pas critiquer, ni condamner les victimes de la tragédie commise par Pilate et par la chute de la tour de Siloé. Il nous incite plutôt à un questionnement, à une prise de conscience en vue d’un nouveau départ, d’une implication dans la mise en œuvre d’un nouvel ordre social qui prend en compte une nouvelle manière de penser, d’agir et de vivre. L’urgence de la conversion ne se présente pas comme une menace, mais comme une invitation libératrice. La conversion, comme exode, est une attitude du cœur, qui exige manifestation externe au quotidien par l’engagement dans des œuvres de charité, dans la promotion de la fraternité et dans la défense de la vie.
Mes frères, mes sœurs, aux nouveaux pharaons de sa génération et de notre génération, et à tous les habitants de la terre, Jésus rappelle que, sous toutes ses formes, la violence engendre la misère et la misère engendre la violence et, du coup, rend l’homme stérile, comparable à un figuier stérile. Les événements malheureux qui se produisent sous nos yeux, partout dans le monde, doivent constituer une occasion de relire notre vie, notre histoire, afin de découvrir notre stérilité personnelle et collective ainsi que le besoin de nous laisser bêcher et d’accueillir, à l’image du figuier de l’Évangile, le fumier nécessaire pour redécouvrir notre vocation baptismale, chrétienne et humaine.
N’oublions pas, frères et sœurs, que le Carême est bien un temps de délai spécial, extraordinaire accordé par le Seigneur en vue de notre conversion. Délai pour pratiquer le bien et la justice dans la charité véritable. Comme nous le dit le Pape François : « Le Carême est un temps propice pour rechercher, et non éviter, ceux qui sont dans le besoin ; appeler, et non ignorer, ceux qui désirent l’écoute et une bonne parole ; visiter, et non abandonner, ceux qui souffrent de la solitude. Mettons en pratique l’appel à faire du bien envers tous en prenant le temps d’aimer les plus petits et les sans défense, les abandonnés et les méprisés, celui qui est victime de discrimination et de marginalisation (cf. Enc. Fratelli tutti, n. 193) ».
Comme du fumier mis aux racines d’une plante pour en assurer sa croissance, ouvrons notre cœur et accueillons le Pardon, la Miséricorde et la grâce de Dieu, tout au long de ce temps fort du Carême. Amen !