Homélie donnée par le Père FRANCKLIN GRACIA
Frères et sœurs,
Dans nos rapports les uns avec les autres, nous aimons bien qu’il y ait toujours de la cohérence. La cohérence entre le dire et le faire nous aide à découvrir au fur et à mesure l’authenticité de l’autre, ce qu’il est en vérité. Vous vous rappelez sans doute ce que Jésus avait dit à ses disciples quand il les avait invités à prier. Il leur a dit « demandez et vous recevrez ». Pourtant Jésus n’a pas répondu positivement à la demande qui lui a été faite. A première vue, on pourrait dire que les deux disciples Jacques et Jean ne font que mettre en application l’enseignement de Jésus. Mais la demande qu’ils ont faite à Jésus est plutôt un privilège ; un privilège à avoir la meilleure place. « Accordez-nous de siéger, l’un à ta droite et l’autre à ta gauche, dans ta gloire », demandent-ils. Demande très logique à vue humaine puisque convoiter les premières places fait partie d’une vision très humaine. L’homme a besoin d’être reconnu, estimé parfois au-delà de ce qu’il est réellement.
Alors regardons le contexte dans lequel cette demande a été faite. Dans les versets précédents, Jésus vient juste d’annoncer à ses disciples pendant qu’ils étaient sur la route de Jérusalem, qu’il va être livré pour être condamné à mort. Il sera donc la risée de tous. Ce qui veut dire il sera le dernier de tous, le méprisé, celui qui n’a pas de voix. C’est là que ces deux disciples voient déjà les premières places. Mais Jésus va les aider à prendre un autre chemin, celui de l’humilité. Il les invite comme il nous invite à ne pas avoir le virus de la folie des grandeurs. En lieu et place de critiquer ces disciples, je nous propose de nous regarder nous-mêmes : A leur place que ferions-nous ? Ne sommes-nous pas tentés de faire la même chose lorsque certaines occasions similaires se présentent ? C’est humain. Donc cela peut nous arriver tous. C’est pourquoi, nous avons besoin de nous laisser conduire par la Parole de Dieu pour que nous puissions être attirés par ce qui est simple en devenant des vrais serviteurs à la suite du Christ qui est venu pour servir et non pour être servi. Le service dans l’amour mes frères et sœurs, est l’élément constitutif de l’Église, c’est-à-dire c’est l’élément essentiel de cette communauté que nous formons dans le Christ. Cette invitation de Jésus nous rejoint tous aujourd’hui ; et l’Église l’a bien compris en appelant le successeur de Pierre (le pape), on l’appelle « serviteur des serviteurs de Dieu ». Celui qui est premier parmi nous, est d’abord serviteur. Oui, il faut être des serviteurs dans l’Église servante.
A ceux qui demandent la première place, Jésus leur demande de le suivre sur un autre chemin. Il les introduit sur une route qu’il n’avait pas imaginée, celle de la souffrance, de la croix. Quand Jésus leur a dit « Pouvez-vous boire à la coupe que je vais boire, recevoir le baptême dans lequel je vais être plongé ? », autrement dit je ne peux pas éviter le chemin de souffrance et de mort sur lequel les hommes m’entraînent ; et vous, êtes-vous prêts à vous engager sur ce même chemin ? Ils répondent oui, nous le pouvons. Ils ont peut-être fait une promesse à laquelle ils n’ont pas imaginé « suivre Jésus, y compris la croix ». De fait, ils vont rendre ce témoignage au Christ en donnant leur vie par amour. Suivre Jésus mes frères et sœurs c’est porter avec lui le cri de l’humanité en étant attentif à tous particulièrement ceux qui semblent être abonnés à des situations difficiles, aux malheurs de toute sorte. Avec l’image de la coupe, il montre qu’ils peuvent s’associer à ses souffrances sans leur promettre la première place voulue.
Jésus donne le sens de sa venue dans le monde et ses disciples sont appelés à suivre son exemple « le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi mais pour servir ». Il s’offre comme un modèle à imiter. « Dans la tradition biblique, le Fils de l’homme est celui qui reçoit de Dieu « gloire, domination et royauté » mais Jésus donne un nouveau sens cette image. Il a le pouvoir en tant que serviteur, la gloire en tant que capable d’abaissement et l’autorité royale en tant que disponibilité totale jusqu’au don de sa vie ». C’est par sa mort qu’il prend la dernière place et nous ouvre à notre vraie place.
Le service envers nos frères et sœurs nous rend capable de pouvoir compatir à leur faiblesse, à leur souffrance à l’instar du Christ, lui le grand prêtre. Jésus fait l’expérience de la souffrance non pour se montrer mais pour manifester sa miséricorde et de compassion. Il connait nos difficultés. Il aime les hommes au point de partager leur faiblesse en vue de leur offrir sa grâce pour les relever et les aider à prendre un nouveau départ. Cette compassion c’est la manifestation de l’amour de Dieu qui rejoint chacun non pas dans ce qu’il devrait être mais dans ce qu’il est aujourd’hui afin d’avancer pas à pas vers lui, ce Dieu qui nous aime et qui nous cherche toujours.Être en état de service c’est nous laisser rencontrer par le regard du Christ qui nous appelle à aller sans peur à la rencontre de nos frères et sœurs. Notre être de chrétien nous demande à être humbles. Nous ne sommes pas meilleurs que les autres mais nous avons cette grâce de faire la rencontre avec le Christ. Nous sommes donc les mains, les pieds, les lèvres et l’aide du Christ dans le monde d’aujourd’hui. « Nous sommes le dernier message de Dieu écrit en actes et en paroles ». Sommes-nous prêts à être serviteurs et témoins auprès de nos frères et sœurs ?
Père Francklin GRACIA, spsj